Rapprochement AdVini–Cordier : pourquoi Bordeaux en sort renforcé
Le rapprochement entre AdVini et Cordier by InVivo redistribue discrètement les cartes du vin français. Derrière l’opération financière, Bordeaux et la Nouvelle-Aquitaine s’imposent comme le véritable centre de gravité industriel et export du futur ensemble.
L’annonce est passée sans fracas. AdVini et Cordier by InVivo sont entrés en négociations exclusives en vue d’un rapprochement. Dans une filière viticole française secouée par la baisse de la consommation, la pression sur les marges et les aléas climatiques, l’information aurait pu rester une ligne de plus dans l’actualité économique de fin d’année.
Cette opération mérite pourtant une lecture plus attentive. Car derrière ce projet, c’est une recomposition silencieuse du paysage viticole qui s’opère. Et dans cette recomposition, Bordeaux et la Nouvelle-Aquitaine ressortent clairement renforcés.
Advini-Cordier une opération industrielle avant d’être financière
Le projet ne ressemble pas à une acquisition classique. Il s’agit d’un apport d’actifs de Cordier by InVivo à AdVini, avec une entrée d’InVivo au capital, sans remise en cause du contrôle majoritaire par la famille Jeanjean. Une construction prudente, pensée pour durer.
Mais surtout, une opération dictée par la réalité du marché. Aujourd’hui, la valeur ne se crée plus uniquement dans la marque ou l’appellation. Elle se joue dans la capacité à produire efficacement, à conditionner, à distribuer et à exporter à grande échelle. Sur ce terrain, Cordier apporte un atout décisif. Et cet atout est largement girondin.
Bordeaux, colonne vertébrale opérationnelle de Cordier
Cordier by InVivo est profondément ancré en Nouvelle-Aquitaine. Sites industriels à Carbon-Blanc, plateformes logistiques à Blanquefort, activités historiques à Bordeaux : le groupe dispose autour de la métropole bordelaise d’un outil industriel et logistique parmi les plus structurés du secteur.
Ces infrastructures irriguent aujourd’hui les marchés français et internationaux. Elles constituent un avantage compétitif difficilement déplaçable. Dans le futur ensemble, elles deviennent mécaniquement centrales.
Autrement dit, le rapprochement conforte Bordeaux dans un rôle souvent sous-estimé ces dernières années : celui de base industrielle et export du vin français, au-delà de son image patrimoniale.

AdVini change d’échelle en Nouvelle-Aquitaine
Pour AdVini, la présence en Gironde existait déjà, mais sur un registre différent. Le Château Patache d’Aux, dans le Médoc, incarne une approche qualitative, tournée vers les marques et l’export premium. Le groupe était présent, mais sans véritable poids industriel régional.
Le rapprochement change la nature de cette présence. En s’appuyant sur l’outil Cordier, AdVini accède à une capacité de déploiement bien supérieure. Bordeaux cesse d’être un point d’ancrage symbolique pour devenir un levier opérationnel à part entière.
Un signal fort pour le territoire
Ce mouvement s’inscrit dans une tendance plus large : la consolidation du secteur viticole contraint de se réorganiser pour survivre. Dans ce contexte, la Nouvelle-Aquitaine ne joue pas le rôle de variable d’ajustement. Elle s’impose comme un pilier du dispositif.
Rien n’est encore figé. Les consultations sociales et les arbitrages opérationnels restent à venir. Mais une chose est déjà acquise : le centre de gravité du futur ensemble penche clairement vers Bordeaux, avec des conséquences très concrètes pour le territoire.
Dans un marché du vin en recomposition accélérée, cette opération alimente plus largement les discussions sur de possibles mouvements de consolidation à venir dans la filière, y compris autour de portefeuilles d’actifs aujourd’hui très fragmentés. D'ailleurs, dans le microcosme bordelais, des rumeurs de consolidation courent entres autres autour du portefeuille de Bernard Magrez.

Ce que dit officiellement le communiqué AdVini–Cordier
AdVini et Cordier by InVivo ont annoncé, le 15 décembre 2025, leur entrée en négociations exclusives en vue d’un rapprochement stratégique de certaines de leurs activités dans la filière vin française. L’opération envisagée prendrait la forme d’un apport d’actifs de Cordier by InVivo à AdVini, et non d’une acquisition classique.
À l’issue de l’opération, InVivo entrerait au capital d’AdVini et en deviendrait un actionnaire de référence, tout en laissant la famille Jeanjean et le président Antoine Leccia conserver la majorité du capital et des droits de vote. Le projet vise à créer un acteur combiné affichant plus de 320 millions d’euros de chiffre d’affaires, dont environ 65 % réalisés à l’international.
Les deux groupes mettent en avant des complémentarités fortes en matière de marques, d’outils industriels, de logistique et de réseaux de distribution, dans un contexte de marché marqué par la baisse de la consommation, la pression sur les marges et les effets du changement climatique.
La finalisation de l’opération reste conditionnée à la consultation des instances représentatives du personnel, à la conclusion des accords définitifs et à la validation réglementaire, notamment par l’Autorité des marchés financiers. L’objectif affiché est une clôture avant la fin du premier trimestre 2026.
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Par Jacques FROISSANT
Directeur de la publication
Bordelais, œnologue, tout allait bien… jusqu’à ce que je dérape dans l’entrepreneuriat RH pour les startups. 😉 Auteur et chroniqueur (L’Express, FrenchWeb, France 3 NOA...), je suis aujourd’hui cofondateur et rédacteur en chef d’AQUI.Media
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