Surf Summit 2025 à Seignosse : la filière glisse cherche sa vague de sens
À Seignosse, le Surf Summit 2025 d’EuroSIMA interroge la filière glisse : entre IA, durabilité et quête de sens, la culture surf se réinvente.

À Seignosse, le Surf Summit 2025 d’EuroSIMA a réuni 450 acteurs du surf business autour d’un mot d’ordre : “Keep riding the change”. Une belle injonction. Mais derrière les sourires et les planches, le secteur s’interroge : comment continuer à “rider” dans un monde secoué par les crises, la sobriété et l’IA ?
Chez AQUI, nous continuons le tour du sport business avec la filière du surf.
Une industrie du surf qui doute, mais ne lâche rien
À première vue, tout va bien. Le décor est parfait : Belambra des Estagnots, ciel bleu, boards qui sèchent sur les rambardes, et un public fidèle, venu écouter champions, patrons et penseurs de la glisse.
« L’édition de l’EuroSIMA Surf Summit 2025 a été un énorme succès, de par la qualité des contenus des conférences, du niveau des échanges lors des tables rondes », salue Jean-Louis Rodrigues, président d’EuroSIMA.
Mais très vite, le ton se fait plus grave. Jean-Louis Rodrigues enfonce le clou : « Le marché n’est plus celui d’avant. Les attentes changent, les comportements aussi. » Derrière la formule “Keep riding the change”, un constat lucide : la filière surf vit une mutation profonde.
Entre consommation en berne, inflation et essoufflement du modèle lifestyle, les marques doivent réinventer leur rapport au marché. Les surfshops indépendants ferment, les géants rationalisent. Et dans ce contexte, l’esprit originel de la glisse – liberté, nature, communauté – se retrouve pris en étau entre rentabilité et responsabilité.
Le surf business à la recherche d’un nouvel équilibre
La table ronde sur le marché français a planté le décor. Cyril Arnaud (Wasted Talent), Philippe Cazeaux (Rip Curl) et Jean-Christophe Chetail (Boardriders) ont déroulé un diagnostic sans filtre.
Le consommateur n’achète plus comme avant. Il compare, revend, répare. Les marges fondent, les points de vente souffrent.
“Un surfshop, ce n’est pas un supermarché”, rappelle Philippe Cazeaux. “C’est un lieu de transmission, de passion, de communauté. Si on perd ça, on perd l’âme de notre culture.”
Et Jean-Christophe Chetail prévient : une marque « perd son image dès lors qu’elle se coupe des magasins spécialisés ».
Les marques doivent réapprendre à collaborer avec leurs distributeurs, plutôt qu’à les contourner. À repenser la proximité, au sens propre. Et à assumer une transformation plus radicale : vendre moins, mais mieux.
Quand les champions parlent vrai
Sur scène, l’ancien pro Jérémy Florès a ému la salle. Pas de discours calibré, pas de storytelling sur “l’après-carrière réussie”. Juste un témoignage brut sur la pression, le doute, le vide post-compétition.
“On parle toujours de performance, jamais de bien-être”, lâche-t-il. “Mais on ne peut pas être bon si on n’est pas bien.” Il ajoute : "Je me fie à l’instinct de l’athlète, j’essaie de comprendre son état d’esprit, son fonctionnement, pour lui donner un maximum de confiance. "
Cette parole, rare dans un milieu souvent muet sur la santé mentale, a résonné. Et fait écho aux ateliers du lendemain, centrés sur la résilience et l’équilibre. L’époque n’est plus à l’héroïsme d’entreprise : les marques qui tiendront seront celles qui sauront ménager leurs équipes autant que leurs marges.
L’IA, entre fascination et lucidité
Autre moment fort : l’intervention de Grégory Pouy, essayiste et observateur des transitions, podcasteur reconnu. L’homme a calmé les ardeurs technophiles :
“L’intelligence artificielle ne va pas remplacer les humains, mais elle révélera les incompétents.”
Dans un secteur où le marketing est roi, la phrase claque. “L’IA, dit-il, doit être un outil d’apprentissage, pas une béquille pour paresse créative.”
Pour les marques de glisse, la leçon est claire : l’innovation numérique ne vaut que si elle nourrit la culture, pas si elle la copie.
De la planche au sac à dos : l’innovation par la frugalité
S’il fallait une image de cette édition, ce serait celle de la planche Newave, présentée par la jeune pousse lauréate du programme Eurosima Innovation.
Sept pièces, neuf configurations, transportable dans un sac à dos. Pas un gadget, mais une vraie réflexion sur la durabilité, la modularité, la logistique.
Ici, l’innovation n’a rien de clinquant. Elle est pragmatique. Réduire, simplifier, recycler. Bref, passer du “toujours plus” au “mieux faire”.
Dans une industrie longtemps accusée de surfer sur le greenwashing, cette frugalité assumée est peut-être la plus belle des révolutions.
Un secteur qui se cherche, mais ne renonce pas
Cette année, moins de buzzwords, plus de discussions à cœur ouvert. Peu à peu, le “surf business” se défait de son vernis californien pour redevenir ce qu’il est vraiment ici, en Nouvelle-Aquitaine : une culture, un tissu économique et humain ancré sur la côte Atlantique, du Pays basque aux Charentes.
La glisse redevient un écosystème, pas un marché. Et c’est peut-être là, au milieu des doutes, que renaît l’authenticité.
Le Surf Summit 2025 laisse l’impression d’un secteur conscient de ses failles, mais prêt à avancer ; lucide sur ses contradictions, mais debout. Car les acteurs de la glisse ont appris à tomber, et surtout à se relever.
Comme le rappelle avec justesse Grégory Pouy : « Le changement, ce n’est pas une vague à surfer. C’est un courant qu’il faut apprendre à lire. »
Loin des slogans, c’est sans doute la plus belle leçon de Seignosse.
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FAQ — Surf Summit 2025 (EuroSIMA)
Qu’est-ce que le Surf Summit 2025 ?
Un rendez-vous pro d’EuroSIMA qui rassemble la filière glisse. Deux jours de contenus, débats et networking à Seignosse.
Combien de participants ?
Environ 450 acteurs du surf business. Marques, retailers, athlètes, experts.
Quels thèmes clés ont marqué l’édition ?
Mutation du marché, rôle des surfshops, santé mentale des athlètes, IA et innovation frugale.
Qui a marqué les esprits ?
Jérémy Florès, pour la parole vraie sur le bien-être. Grégory Pouy, pour sa mise au clair sur l’IA. Cazeaux, Chetail et Arnaud, pour le terrain.
Qu’est-ce que Newave a présenté ?
Une planche modulaire en sept pièces. Neuf configurations, transportable en sac à dos.
Pourquoi les surfshops restent essentiels ?
Ils portent l’histoire des marques et la culture locale. Couper ce lien abîme l’image et la fidélité.
Quelle place pour l’IA dans la glisse ?
Outil d’apprentissage et d’efficacité, pas un substitut à la culture. « L’intelligence artificielle ne va pas remplacer les humains, mais elle révélera les incompétents. »