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Économie

Shein au BHV et aux Galeries Lafayette : à Limoges aussi, la pilule passe mal

Shein arrive au BHV et aux Galeries Lafayette. Colère des commerçants, rappel du précédent Pimkie et levée de bouclier nationale contre l’ultra fast-fashion.

Par Jacques FROISSANT
Publié il y a 3 oct.
5 min de lecture
Shein au BHV et aux Galeries Lafayette : à Limoges aussi, la pilule passe mal
Shein aux Galeries Lafayette

Une enseigne chinoise d’ultra fast-fashion dans les vitrines d’un grand magasin historique ? C’est la bombe qui secoue la mode française. Shein, géant du textile jetable, s’installe physiquement en France, et pas seulement à Paris. À Limoges, les Galeries Lafayette sont directement concernées. Et l’annonce provoque une levée de boucliers sans précédent.

De Pékin à Limoges : le choc des mondes

Jusqu’ici, Shein c’était du clic et du colis : un empire en ligne, des millions de références, et un modèle basé sur des prix imbattables. Mais depuis octobre, le mastodonte chinois a décidé de s’implanter en dur en s’installant au BHV Marais à Paris et cinq franchisés Galeries Lafayette en province.

Parmi eux, les Galeries Lafayette de Limoges, place de la République. Une adresse chargée d’histoire, symbole du commerce de centre-ville. Voir débarquer Shein dans ces murs, c’est un peu comme si un fast-food low-cost s’invitait dans un restaurant étoilé : ça grince.

Le groupe Galeries Lafayette vent debout

Le groupe Galeries Lafayette (la maison mère) s’est empressé de marquer sa distance. Officiellement, le partenariat relève de SGM, gestionnaire des Galeries de Limoges, Dijon, Grenoble, Reims et Angers, en franchise.

Mais Paris dénonce une “contradiction flagrante avec les valeurs de la marque.”.Shein, rappelons-le, est accusé de “mode jetable”, de conditions de travail indignes et de greenwashing. La marque chinoise n’a rien à faire sous une enseigne censée incarner l’élégance et le patrimoine français. Le différend pourrait même se régler devant les tribunaux, tant la question des clauses contractuelles du respect des valeurs est sensible.

À Limoges, entre colère et incrédulité

À Limoges, les commerçants indépendants du centre-ville parlent de “trahison”. L’un d’eux nous confie : “On nous parle de circuits courts, de commerce responsable, et là, la vitrine du centre accueille Shein ? C’est à se demander si nos efforts ont un sens.”

Les élus locaux, eux, observent la situation avec embarras. Difficile de se réjouir d’une implantation qui promet du flux de clients, quand l’image de la ville pourrait en sortir ternie. Limoges mise beaucoup sur son identité artisanale (porcelaine, cuir, textile haut de gamme). Accueillir Shein brouille le message.

Le précédent Pimkie

Ce n’est pas la première fois que Shein s’invite par la bande dans le paysage français. En septembre, l’annonce d’un partenariat entre Pimkie et Shein avait déjà provoqué une onde de choc.Le président de la Fédération du prêt-à-porter féminin, Yann Rivoallan, avait alors dénoncé une “véritable honte” et rappelé que Shein “se moque des droits humains, viole les droits sociaux et saccage l’environnement”. Il accusait Pimkie d’avoir bradé son histoire pour “un partenariat de la honte” et appelait à la constitution d’une coalition européenne pour contrer le modèle Shein.

Cet épisode avait marqué les esprits : pour beaucoup, l’affaire Pimkie a préparé le terrain à la polémique actuelle. Elle montre que le malaise dépasse une enseigne précise : c’est tout le modèle de l’ultra fast-fashion qui est mis en accusation.

Une levée de boucliers nationale

À Paris, la Caisse des dépôts, pourtant impliquée dans les murs du BHV, dit dans un communiqué de presse, ne pas “cautionner”. Les adjoints à la mairie dénoncent un partenariat “contraire aux ambitions écologiques et sociales de la capitale”. L’Alliance du Commerce, qui regroupe les enseignes de mode, s’insurge : “On ne peut pas présenter comme sauveur celui qui fragilise le secteur depuis dix ans.”

Et Yann Rivoallan, encore lui, continue de marteler : “En face de l’Hôtel de Ville de Paris, on ouvre un méga-magasin Shein qui, après avoir détruit des dizaines de marques françaises, vise à inonder encore plus notre marché de produits jetables.”

Shein essaye de s’acheter une respectabilité

Shein au BHV ou aux Galeries, ce n’est pas seulement un bail commercial. C’est une normalisation. Voir la marque s’afficher dans des lieux symboliques, c’est lui donner une légitimité culturelle qu’elle n’avait pas encore en France. Et c’est bien ce qui inquiète : la bataille de Limoges n’est pas qu’une querelle de vitrines. Elle pose la question de ce que nous voulons défendre dans nos centres-villes. Des enseignes mondialisées prêtes à tout pour écouler leurs stocks, ou une identité locale et durable ?

À Limoges, comme ailleurs, l’affaire Shein fait figure de crash-test. Entre le court terme économique et le long terme écologique et culturel, il faudra choisir. Et les Galeries Lafayette de Limoges sont désormais en première ligne.


FAQ Shein aux Galeries Lafayette de Limoges

Qui est Shein ?

Shein est une entreprise chinoise de mode en ligne créée en 2008. Devenue leader mondial de l’ultra fast-fashion, elle s’appuie sur des prix très bas et un renouvellement constant des collections.

Comment sont fabriqués les produits Shein ?

Les vêtements Shein sont produits en Chine et dans plusieurs pays à bas coûts. Le modèle repose sur une production ultra-rapide, avec des critiques récurrentes sur les conditions de travail (semaines de 70 heures, salaires dérisoires) et l’usage de matières synthétiques polluantes.

Pourquoi l’arrivée de Shein aux Galeries Lafayette de Limoges fait polémique ?

Parce que les Galeries Lafayette incarnent un patrimoine culturel et commercial français. Accueillir Shein, accusé de pratiques sociales et environnementales destructrices, est jugé contradictoire et dangereux pour l’image du centre-ville.

Quel est le précédent Pimkie avec Shein ?

En septembre 2025, Pimkie avait annoncé un partenariat avec Shein. La décision avait provoqué un tollé, notamment de la part de Yann Rivoallan (Fédération du prêt-à-porter féminin), qui dénonçait une “honte” et appelait à une riposte européenne.

Que disent les Galeries Lafayette à propos de Shein ?

Le groupe Galeries Lafayette a pris publiquement ses distances. Il estime que ce partenariat, décidé par l’affilié SGM, est en contradiction avec ses valeurs et pourrait même violer les clauses contractuelles d’affiliation.

Quelles alternatives à la fast-fashion à Limoges ?

Limoges défend un commerce de proximité et des filières locales : artisanat de la porcelaine, cuir, textile haut de gamme, et boutiques indépendantes. Autant d’alternatives durables face à Shein.