Plage aux Entrepreneurs : le verre à moitié vide, à moitié plein
Arcachon : quand le Made in France vire au prêche politique. La Plage aux Entrepreneurs promettait inspiration et solutions, elle a servi des slogans.

À Arcachon, la Plage aux Entrepreneurs version 2025 avait tout pour séduire : magnifique vue sur le bassin, décor de scène sublime, grands noms et un thème qui sonne juste : le Made in France. Plus de 500 dirigeants réunis, un parrain prestigieux (Pierre Gattaz), une affiche d’intervenants calibrés pour inspirer. À l’affiche : Natacha Polony, Louis Gallois, Yves Jégo, des patrons inspirants comme Philippe Rivière (ACI Groupe) ou Vincent Vallin (Duralex).
Bref, le casting parfait pour inspirer. Et pourtant, derrière récits galvanisants rapidement suivis d’envolées patriotiques, un malaise a flotté : à qui parlait-on vraiment ?
Des histoires qui inspirent…
Philippe Rivière a capté l’audience avec un récit taillé pour galvaniser. Ingénieur des Arts et Métiers, passé par la Chine et le Japon, il a bâti en six ans ACI Groupe : 35 sites, 1 600 salariés, 200 M€ de chiffre d’affaires. Sa fierté ? Reprendre et sauver 40 entreprises industrielles, redonner un avenir à des cols bleus oubliés. Le genre de “fou” qui fait bouger l’industrie française.
Même intensité du côté de Vincent Vallin, nouveau patron de Duralex en SCOP. Derrière lui, un parcours cosmopolite — BP, Decathlon, Akzo Nobel, Brandt — et la conviction qu’“expansion ne veut pas dire délocalisation”. Mais sa conférence, plus tournée vers son CV que vers la mécanique d’une reprise en Scop, a laissé sur leur faim ceux qui espéraient des clés concrètes.
Et puis, il y a eu Natacha Polony, inattendue dans cet exercice de confidence. « Je ne parle jamais de ma vie, de moi. Mais cette matinée est intéressante pour comprendre les motivations de ceux qui innovent et entreprennent. Ça m’a permis de parler de ce en quoi je crois », a-t-elle confié. Une parenthèse plus intime qui a marqué, justement parce qu’elle détonnait dans un océan de discours formatés.
A noter aussi, la très intéressante Masterclass sur l’Influence Linkedin par le duo très complémentaire formé par Sandrine Chauvin (Linkedin) et Laurent Moisson (Forces Françaises de l’Industrie).
…et des tribunes politiques
Très vite, la scène s’est transformée en tribune idéologique. Yves Jégo appelant à “brûler les Lidl”. Rien que cela ! Pierre Gattaz multipliant les références au “bon sens paysan” et au “respect de l’entreprise”. Le même appelant à pratiquer un “trotskisme libéral”, autrement dit infiltrer les médias et occuper le terrain. On dirait du CNews.
Natacha Polony plus nuancée brandissant la souveraineté comme mantra. Louis Gallois a eu le mérite d’apporter quelques chiffres qui piquent : seulement 57 % des industriels français intègrent les nouvelles technologies, contre 67 % en Europe et 73 % aux États-Unis. Mais l’essentiel du débat a sombré dans le Yaka FautKon politique.
Plage aux Entrepreneurs : erreur de casting ?
Dans les allées, le constat était partagé : la plupart des entrepreneurs présents n’étaient pas venus pour un meeting politique. Ce qu’ils attendaient ? Des solutions pour recruter dans un contexte de pénurie de compétences, des pistes pour financer leur croissance sans se heurter aux banques obsédées par l’immobilier, des témoignages opérationnels sur la relocalisation réussie. Bref, de l’inspiration et du concret. Heureusement le networking a bien fonctionné le midi et pendant la soirée. Les discussions entre participants étaient de l’avis de beaucoup bien plus constructives.
Made in France, oui mais…
La Plage aux Entrepreneurs a rappelé l’importance de défendre et promouvoir le Made in France. Oui, il est stratégique de maintenir des filières, de valoriser nos savoir-faire, d’affirmer notre souveraineté industrielle. Mais transformer ce rendez-vous en tribune politique, c’est passer à côté de l’essentiel. Les dirigeants présents voulaient des idées neuves, pas des slogans. À Arcachon, ils sont venus chercher du souffle, pas du souffre.
Conclusion ? Défendre le Made in France, le mettre en avant, mille fois oui. Mais si l’événement se mue en estrade pour figures politiques recyclées, il rate sa cible. Les entrepreneurs attendent d’abord de l’inspiration, des témoignages, et des solutions pratiques. Pas un festival de discours d’inspecteur des travaux finis.
A final, une Plage aux Entrepreneurs au verre (Duralex bien sur) à moitié vide et à moitié plein. Mitigé comme le temps ce jour-là.

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