Achraf Hakimi versus Gérard Darmon
"Séparer l'oeuvre de l'artiste", un principe encore en vigueur dans le football ?
Quand on effectue une recherche internet sur Achraf Hakimi deux informations s’entrechoquent : sa valeur marchande qui est de 80 M€ et son renvoi demandé par la Parquet de Nanterre devant la cour criminelle pour viol.
Sans préjuger de la décision de justice à venir, ce cas est emblématique des V.S.S. dans le sport de haut niveau professionnel. Il pose la question de la présomption d’innocence aussi bien que celle de l’écoute et du soutien à la victime. Il est aussi révélateur d’une différence de traitement entre les acteurs du monde sportif et le reste des « peoples », qu’ils soient artistes, chefs d’entreprises ou personnalités politiques.
Hakimi, comme tous les joueurs du P.S.G., est devenu une icône le jour du sacre de son club en Ligue des Champions. Régulièrement sélectionné par l’Equipe du Maroc, il disputera très certainement la prochaine Coupe du Monde. Mais l’homme est, lui, mis en examen et placé sous contrôle judiciaire pour viol depuis 2023 …
Si les faits sont avérés, que doit ressentir sa victime ? Voir son violeur faire la une des journaux, postuler au Ballon d’Or, être reçu par le Président Macron
Demain, quelle victime d’un acte commis par un sportif de haut niveau osera aller déposer plainte ? Dira-t-on d’elle qu’elle fait juste ça pour l’argent et que son dépôt de plainte est assimilable à du racket comme dans le cas Hakimi ?
Si on se positionne à l’inverse, un joueur verra-t-il sa carrière brisée sur la base d’allégations infondées ? Benjamin Mendy a été incarcéré, puis a vu sa carrière pratiquement terminée pour finalement être blanchi de tous les chefs d’accusations. Si la mise en examen fait la une, la relaxe ne fait qu’un entrefilet mais la suspicion reste gravée dans le marbre.
Et si Hakimi était un acteur ou un homme politique pourrait-il exercer pleinement son métier ? La réponse est non. Il y a une différence flagrante de traitement. Au moindre soupçon l’artiste ou le politique sont « interdits » d’exercer. La vindicte populaire s’applique à plein et le moindre déplacement s’accompagne de manifestations visant à interdire toute activité publique.
Être sportif de haut niveau n’est pas un talisman d’impunité, être artiste ou homme politique ne fait pas de vous un coupable certain. Notre société, de plus en plus dictée par les réseaux sociaux, doit s’interroger sur sa faculté à prendre du recul et à ne plus être dans une culture du jugement hâtif, instantané.
Peut-être suffirait-il juste de respecter le secret de l’instruction et de laisser la justice faire son travail en toute sérénité. Ce serait surtout le seul moyen pour la victime de se sentir écoutée et pour la personne présumée coupable de disposer d’un droit à la défense équitable.
C’est théoriquement le fondement de notre système judiciaire mais depuis Facebook, X, TikTok, Instagram and co sont passés par là et la sentence des réseaux prend plus de valeur que celle des hommes.
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