Talence-Médoquine : la gare qui peut désengorger Bordeaux ?
Talence-Médoquine rouvre enfin : une petite gare oubliée qui pourrait bien changer la mobilité de Bordeaux et le quotidien de milliers d’habitants.

“La Médoquine ? pour moi c’était le passage à niveau sur la route de la Fac de Talence qui nous mettait en retard, car la vieille garde-barrière ouvrait avec sa manivelle à main le passage à la vitesse d’un escargot !” se remémore un bordelais les années 80 avant la transformation en pont. La gare étant elle fermée depuis longtemps.
On pourrait croire que ce n’est qu’un petit quai rouvert en catimini, un vieux bâtiment de briques réveillé d’un long sommeil. Mais la réouverture de la gare de Talence-Médoquine, le 21 septembre 2025, est bien plus qu’un ruban coupé : c’est un symbole. Celui d’une métropole qui étouffe sous les embouteillages et qui tente, enfin, de miser sur le rail.
La gare de Talence-Médoquine : une vieille dame remise sur pied
La gare de Talence-Médoquine n’est pas née d’hier. Ouverte en 1841, elle a vu défiler les locomotives à vapeur avant d’être reléguée aux marchandises. Elle ferme aux voyageurs en 1949, puis totalement en 1987. Pendant des décennies, Talence (45 000 habitants) est restée une anomalie : la seule grande ville française sans gare voyageurs. Une aberration quand on sait que ses rues débordent d’étudiants, de soignants et de salariés contraints de jongler entre tram bondé et voiture coincée.
Pourquoi est-ce si important ?
Parce que cette halte devient un morceau du puzzle du RER métropolitain bordelais. Deux lignes TER s’y arrêtent désormais (Arcachon–Libourne et Bordeaux–Le Verdon). Et la gare ne se limite pas à un simple quai : elle se transforme en pôle multimodal avec parkings vélos, stationnements partagés, et connexion prévue avec le futur Bus Express Pellegrin-Gradignan. Voir plan des lignes ci-dessous.
Bref, la Médoquine, c’est une promesse d’interconnexions, à 4mn de la Gare Saint-Jean, à deux pas du CHU et du campus universitaire. Plus rien à voir avec notre image de vieux passage à niveau à côté d’une gare désaffectée.
À cette occasion, le maire de Talence, Emmanuel Sallaberry, tout heureux de l’aboutissement de ce long combat, soulignait : «Entamée en 2011, la très forte mobilisation des associations d’usagers et des habitants a été déterminante pour la réouverture de cette gare.»
Un pari sur l’avenir
Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
- 148 000 habitants vivent à moins d’1 km.
- 4 500 voyageurs quotidiens attendus d’ici 2030.
- 25 millions d’euros d’investissement, financés par l’État, la Région et Bordeaux Métropole.
C’est aussi une réponse à la saturation du tram et aux 80 000 véhicules/jour qui asphyxient la rocade.
Une bataille politique gagnée ?
Cette réouverture n’est pas tombée du ciel. Il a fallu des années de mobilisation d’associations, de riverains et d’élus locaux. Bordeaux Métropole et la Région ont fini par acter le projet en 2018, avec un calendrier sans cesse repoussé. Résultat : la gare a rouvert en 2025, avec deux ans de retard sur les promesses initiales.
Le prix de l’attente ? Une démonstration que, face aux lobbies de la voiture et aux inerties administratives, il faut parfois s’entêter.
Et si la gare est enfin là, une autre bataille continue : celle des tarifs. Pour rappel, la Région Nouvelle-Aquitaine mène la fronde contre SNCF Réseau.
La Médoquine : plus qu’une gare, un test ?
La Médoquine, c’est un test grandeur nature : si cette réouverture est un succès, elle renforcera l’idée qu’il est possible de désengorger la métropole par le rail. Si elle reste une coquille vide, ce sera une occasion ratée.
Car au fond, la vraie question n’est pas “Pourquoi la gare de la Médoquine est importante ?” mais : Bordeaux et sa périphérie ont-elles enfin décidé de prendre le train du XXIᵉ siècle ?
