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Société

Harcèlement scolaire à Bordeaux : le récit d’une mère face à l’omerta

Harcèlement scolaire à Bordeaux : une mère raconte le calvaire de sa fille de 14 ans. Isolement, pleurs, déni du collège : l’omerta continue.

Par la rédaction
Publié il y a 26 sept.
10 min de lecture
Harcèlement scolaire à Bordeaux : le récit d’une mère face à l’omerta

Une adolescente de 14 ans, un collège du centre-ville de Bordeaux, et un mot qu’on n’a pas le droit de prononcer : “harcèlement”. Derrière le témoignage d’une mère, se dessine une mécanique bien connue : déni institutionnel, culpabilisation de la victime et impunité des agresseurs. Pendant ce temps, la politique locale promet que “ce combat doit être l’affaire de tous”. Mais que valent les slogans face à l’omerta des établissements ?

Cette mère nous a envoyé son long témoignage dans un document de pas moins de 8 pages. Détaillé, factuel, un vrai cri d’alarme, qu’elle pose pour que cela serve à d’autres parents. Et dans l’espoir de bousculer l’institution. 

Le jour où tout bascule

Beaux quartiers de Bordeaux, un collège public réputé. Une fille très sociable et très scolaire. Elle aime le collège, a une moyenne aux alentours de 15/20 et chaque année elle est élue déléguée de classe. 

L’histoire commence par un SMS. Une “amie” annonce brutalement qu’elle ne parlera plus jamais à la jeune fille de 14 ans. Classique brouille d’adolescents ? Non. Très vite, la mécanique du harcèlement s’installe : mise à l’écart, regards méchants, bousculades, rumeurs sur les réseaux sociaux. La victime s’effondre, pleure, perd le sommeil.

Une psychopraticienne confirme rapidement le diagnostic : harcèlement scolaire. Mais au collège, ce mot devient tabou. Le CPE balaie le diagnostic, conteste la compétence de la thérapeute et tranche : « Ici, le harcèlement n’existe pas ». Pire, il retourne l’accusation contre l’élève : elle aurait insulté ses camarades. Résultat : culpabilisation, isolement, effacement de sa parole. Prononcer le mot “harcélement” est interdit dans ce collège du centre ville à la population bon chic bon genre. 

L’institution ferme les yeux

Au fil des semaines, les humiliations s’accumulent : excuses forcées devant les harceleuses, convocations au haut-parleur qui l’exposent aux yeux de tous, entretiens où ses propos sont systématiquement minimisés. « Tu prends les choses trop à cœur », lui dit-on. Comme si la sensibilité était une faute.

La mère alerte, écrit, appelle le numéro national… qui sonne dans le vide. Lorsqu’enfin quelqu’un décroche, c’est… un comptable du ministère, débordé d’appels similaires. Kafka, version scolaire.

Pendant ce temps, les agresseuses rient, impunies. Mieux : l’une d’elles reçoit des félicitations publiques pour son « comportement irréprochable ». On croit rêver.

Extraits du témoignage

« Monsieur, ma fille va mal. C’est un fait. »

« Le CPE m’a dit : le harcèlement n’existe pas dans mon établissement. Dans notre quartier les gens sont intelligents et bienveillants. »

« Elle est convoquée au haut-parleur, tout le monde la regarde. Elle pleure ensuite toute la soirée. »

« Elle me demandera si elle doit avoir de mauvaises notes pour qu’on la croie. »

« Quand j’appelle le 3020, je tombe sur un comptable du ministère… il reçoit des dizaines d’appels comme le mien. »

Des phrases simples, directes, qui claquent comme des gifles et suffisent à résumer l’absurde. La souffrance existe, mais l’institution préfère la nier, l’enterrer ou la renvoyer ailleurs. La mère n’écrit pas pour elle. Elle écrit pour que cela serve à d’autres.

Le dispositif PHARE : inefficace contre le harcèlement ?

Ce n’est pas un cas isolé. Selon le ministère de l’Éducation Nationale, un élève sur dix est victime de harcèlement. D’autres études montent jusqu’à un sur cinq au collège. L’UNICEF évoque près de 700 000 enfants concernés chaque année. En 2024, le ministère a enregistré 62 000 signalements (+60 % en un an). Et l’Observatoire national du suicide rappelle : le harcèlement est la première cause de suicide chez les moins de 18 ans.

Le dispositif PHARE, censé lutter contre le phénomène, existe… sur le papier. Dans les faits, comme à Bordeaux, il se réduit trop souvent à des réunions, des classeurs remplis, et des “dossiers à remonter au rectorat”.

Quand la politique s’en mêle… de trop loin

Sur le harcèlement scolaire, la plupart des responsables politiques se contentent de déclarations générales, de journées de mobilisation et de slogans creux. Le sujet fait consensus… mais rarement l’objet d’un vrai travail de fond.

Que fait la Mairie de Bordeaux ?

La Ville organise des ateliers de sensibilisation dans les écoles et soutient quelques associations. Mais pas de budget dédié, pas de chiffres publics, pas d’évaluation claire. En réalité, Bordeaux agit à la marge : communication, prévention symbolique… Pendant que l’Éducation nationale garde la main sur les décisions lourdes. Résultat : un sujet traité trop souvent à distance.

Néanmoins, Thomas Cazenave, conseiller municipal et candidat déclaré à la mairie sort toutefois du lot. Le 23 septembre, il écrivait sur X : « Lors de chacune de mes visites dans les établissements scolaires, la question du harcèlement revient régulièrement. Parce que ce combat doit être l’affaire de tous, j’ai rencontré l’association des bikers qui se mobilise pour faire reculer ce fléau. »

Autrement dit, là où beaucoup se contentent de parler “à distance”, il prend le sujet à bras-le-corps, descend sur le terrain, rencontre des acteurs associatifs. Mais la question demeure : suffira-t-il de bonnes intentions locales pour briser l’omerta des établissements, où le mot “harcèlement” reste encore interdit ?

Le prix du silence et le déni de l'Education Nationale

Dans le collège bordelais, le prix du déni est lourd. La jeune fille perd confiance, cesse de manger, s’épuise. Les nuits deviennent un champ de bataille : insomnies, cauchemars, réveils en pleurs. « Elle me demandera si elle doit avoir de mauvaises notes pour qu’on la croie », raconte sa mère, sidérée. Jusqu’au jour où la phrase tombe : « Maman, je veux mourir. »

La mère s’effondre à son tour, hospitalisée cinq semaines. « Non ma fille, c’est à moi de te protéger et non à toi », écrit-elle dans son témoignage. Elle encaisse, persuadée qu’il vaut mieux que ce soit elle qui craque plutôt que son enfant.

Et puis, le drame absolu. En juin, une élève de la même classe de 4e se suicide. « J’en ai des frissons en l’écrivant », confie la mère. Un électrochoc qui aurait dû tout changer. Mais rien. La cellule anti-harcèlement est convoquée, les réunions s’enchaînent, les classeurs se remplissent. Et toujours la même réponse, glaçante : « Nous n’avons pas le droit de dire harcèlement tant que le rectorat ne l’a pas validé. »

La souffrance est bien réelle, mais l’administration préfère cocher des cases plutôt que de protéger des vies. 

De victime à accusée : le monde à l’envers

Dernier épisode : l’adolescente change enfin de collège. Elle respire. Mais les rumeurs suivent : « Elle a été virée parce qu’elle harcelait les autres ». Le monde à l’envers. La mère alerte encore, mais le principal du premier collège répond froidement : « Votre fille n’est plus dans mon établissement, je ne ferai rien ».

Quand elle ose rappeler qu’un suicide a déjà eu lieu dans ce même collège, il menace de… porter plainte contre elle. Voilà où mène l’aveuglement : à protéger l’institution, jamais l’enfant.

Harcèlement à Bordeaux : un scénario qui se répète

Ce qui se joue à Bordeaux n’est pas qu’une affaire locale. C’est un miroir national. À chaque fois, la même séquence : minimisation des faits, culpabilisation de la victime, inertie des dispositifs, et communication politique hors sol. Et chaque fois, les enfants paient l’addition.

Le témoignage se termine par une lueur d’espoir : une nouvelle école, de nouvelles amies, un club de volley retrouvé. Mais le poison reste : l’impunité des agresseuses, la solitude de la famille, l’angoisse que tout recommence.

Alors, jusqu’à quand ? Combien de suicides ou d’enfants en suivi psychiatrique long faudra-t-il encore pour que l’institution cesse de protéger ses murs plutôt que ses élèves ?

Agir collectivement face au harcélement

Le harcèlement scolaire traumatise et va jusqu’à tuer mais il n'est pas une fatalité. À Bordeaux comme ailleurs, le mot “interdit” doit enfin être prononcé. Des parents, des associations et des élus tentent de briser l’omerta. Mais pour que les choses changent, il faut agir collectivement : signaler, documenter, exiger des comptes. Si vous êtes confronté à cette situation, les ressources ci-dessus sont là pour vous aider.


Harcèlement scolaire à Bordeaux : 10 questions pour comprendre et agir

En Nouvelle-Aquitaine, près d’un élève sur cinq serait victime de harcèlement scolaire. À Bordeaux, des parents dénoncent le déni des établissements et l’absence de solutions concrètes. Que faire face à cette violence ? Qui contacter ? Comment prouver les faits ? Voici les réponses à vos questions, avec des ressources locales.

1. Comment reconnaître les signes de harcèlement scolaire chez un enfant ?

Les signes sont souvent discrets, mais certains indices doivent alerter :

  • Comportementaux : Refus d’aller en cours, isolement, pleurs inexpliqués, ou au contraire, agressivité inhabituelle.
  • Physiques : Troubles du sommeil, maux de ventre, perte d’appétit, ou blessures (ecchymoses, vêtements déchirés).
  • Scolaires : Chute brutale des notes, désintérêt pour les activités habituelles.

À Bordeaux, des associations comme Hugo ou Marion la Main Tendue proposent des grilles d’évaluation pour aider les parents à identifier ces signes.


2. Mon enfant est harcelé dans son collège : quelles démarches urgentes ?

  1. Écouter et documenter :
    • Noter les dates, lieux, noms des harceleurs, et conserver les preuves (SMS, captures d’écran).
  2. Contacter l’établissement :
    • Envoyer un mail ou une lettre recommandée au CPE ou au principal, en exigeant une réponse écrite.
    • Exemple de formulation : « Mon enfant subit des comportements répétés de harcèlement. Quelles mesures concrètes allez-vous prendre ? »
  3. Signaler le cas :
    • Appeler le 3020 (numéro national) ou le 3018 (cyberharcèlement).
    • Utiliser la plateforme Pharos pour les cas en ligne.

À savoir : À Bordeaux, le rectorat de l’académie peut être saisi en cas d’inaction de l’établissement.


3. Le collège nie le harcèlement : quels recours pour les parents bordelais ?

Si l’établissement refuse d’agir comme dans l'exemple de l'article ci-dessus :

  • Saisir le rectorat :
    • Envoyer un courrier avec preuves à : Rectorat de Bordeaux – 5 rue Joseph de Carayon-Latour, 33000 Bordeaux.
  • Contacter le Défenseur des droits :
  • Mobiliser un collectif :

Cas extrême : Engager un avocat pour non-assistance à personne en danger.


4. Quels sont les numéros d’urgence à Bordeaux pour le harcèlement scolaire ?

  • 3020 : Numéro national (gratuit, anonyme).
  • 3018 : Cyberharcèlement (signalement et soutien psychologique).
  • 119 : Enfance en danger (pour les situations critiques).
  • Fil Santé Jeunes : 09 70 20 22 23 (écoute et conseils).

Ressources locales :


5. Mon enfant est accusé à tort de harcèlement : comment réagir ?

  1. Demander des preuves à l’établissement (témoignages, captures d’écran).
  2. Consulter un avocat si l’accusation est infondée et porte préjudice.
  3. Impliquer un médiateur scolaire (certains collèges bordelais en ont un).
  4. Rassembler des témoignages (enseignants, élèves) pour défendre votre enfant.

À Bordeaux, la Ligue des Droits de l’Homme peut conseiller les familles.


6. Comment agir contre le cyberharcèlement à Bordeaux ?

  1. Signaler les contenus sur les réseaux sociaux (outils intégrés).
  2. Porter plainte :
    • Le cyberharcèlement est un délit (jusqu’à 2 ans de prison).
    • Se rendre au commissariat avec les preuves.
  3. Contacter le 3018 pour un accompagnement psychologique et juridique.

À Bordeaux, la brigade numérique de la police intervient pour les cas graves.


7. Quelles sont les obligations des collèges bordelais face au harcèlement ?

Réponse : Les établissements doivent :

  • Prévenir le harcèlement (programmes comme PHARE).
  • Protéger les victimes (sanctions contre les harceleurs, changement de classe).
  • Signaler les cas graves au rectorat.

En cas de manquement, les parents peuvent saisir le Défenseur des droits.


8. Où trouver une aide psychologique pour mon enfant à Bordeaux ?

Réponse :

  • CMP (Centres Médico-Psychologiques) :
    • Ex. : CMP Enfants-Adolescents du CHU Pellegrin.
  • Associations :

Certaines consultations sont gratuites pour les familles en difficulté.


9. Comment changer mon enfant de collège à Bordeaux en urgence ?

  1. Demander un rendez-vous avec le Dasen (Directeur académique) de la Gironde.
  2. Fournir des preuves (certificats médicaux, témoignages).
  3. Contacter la mairie pour une réaffectation prioritaire.

Conseil : Impliquer un médecin scolaire ou un pédopsychiatre pour appuyer la demande.


10. Existe-t-il des ateliers contre le harcèlement à Bordeaux ?

Réponse : Oui, plusieurs structures agissent :

  • Mairie de Bordeaux : Ateliers en milieu scolaire (plus d’infos).
  • Associations :
    • Les Petits Citoyens : Interventions en classe.
    • Biker Contre le Harcèlement : Sensibilisation via des motards bénévoles.

Pour les parents : Des conférences sont organisées par Hugo ou Marion la Main Tendue.

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